Contraindre la fille vierge, majeure et raisonnable [à se marier] | Le site officiel du Cheikh Mohamed Ali FERKOUS
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Mardi 14 Chawwâl 1445 H - 23 avril 2024 G



Fatwa n° 896

Catégorie : Fatwas relatives à la Famille - L'acte de mariage - L'établissement d'un acte de mariage

Contraindre la fille vierge, majeure
et raisonnable [à se marier]

Question :

Un père a forcé sa fille à se marier – à contrecœur – avec un homme qu’elle ne désire pas, sachant que cet homme a payé la dot entièrement. Ce mariage est-il valable ? Est-il permis à la fille de refuser ce mariage ? Qu’Allâh vous récompense.

 

Réponse :

Louange à Allâh, Maître des Mondes ; et paix et salut sur celui qu’Allâh عزّ وجلّ a envoyé en miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection. Cela dit :

Il n’est point permis au tuteur de contraindre la femme, qui est sous sa tutelle et qui est vierge, majeure et douée de raison, à se marier. Cela est l’opinion la plus prépondérante des ulémas. Cette opinion est adoptée par l’école hanafite et par Ahmad, selon une des versions qu’on rapporte de lui. Elle est aussi adoptée par Ibn Tayymia suivant le hadith rapporté par Ibn ‘Abbâs رضي الله عنهما et dans lequel il est dit : « Une jeune fille vierge était venue auprès du Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم pour l’informer que son père l’avait mariée à un homme à contrecœur. Alors, le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم lui a donné le choix [d’approuver le mariage ou de l’annuler] »(1), ainsi que le hadith dans lequel le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم dit : « On ne marie pas une femme vierge sans son accord »(2), et le hadith dans lequel il صلَّى الله عليه وسلَّم dit : « Le père de la femme vierge doit avoir son accord au sujet de son mariage. »(3)

En principe, le fait que le tuteur décide de l’organe intime de la femme, qui est sous sa tutelle, est similaire au fait qu’il décide [de l’usage] de ses biens. Et du moment qu’il lui est interdit de décider [de l’usage] de ses biens, si elle est mûre, sans sa permission, il lui est, a fortiori, interdit de décider de son organe intime alors qu’elle exprime, en étant mûre, une attitude de refus et de détestation, car son organe intime est plus important que les biens dont elle dispose.

D’autre part, la Charia a donné à la femme le droit de demander le divorce pour se défaire d’un mari qu’elle déteste. Comment serait-il permis, alors, de la lui marier au départ ?

Ibn Taymiyya ـ رحمه الله ـ a dit : « Quant au fait de marier la femme à contrecœur, cela est contraire aux principes [religieux] et à la raison. Allâh عزّ وجلّ n’a pas autorisé le tuteur à la contraindre à effectuer une vente ou une location qu’avec sa permission. De même, il n’est pas autorisé à la contraindre à consommer une nourriture ou une boisson, ou bien à porter un habit qu’elle ne désire pas. Comment pourrait-il, alors, la contraindre à avoir des rapports avec un homme qu’elle déteste, ou de cohabiter avec celui qu’elle n’aime pas ? En vérité, Allâh عزّ وجلّ a placé l’affection et la bonté entre les deux époux. Quelle affection et quelle bonté y aurait-il si la femme, qui cohabite avec son mari, ne lui voue que haine et répulsion ? »(4)

La cause de la divergence au sujet de cette question est le point dont dépend la contrainte : est-ce la minorité de la fille ou bien sa virginité ? En effet, les hadiths ainsi que l’analogie et le bon sens soutiennent que c’est, plutôt, la minorité.

Du reste, si le tuteur la marie sans avoir son consentement, le contrat de mariage sera alors annulable et dépendra de son approbation ou de son annulation. Si elle le confirme, il devient valide et on n’aura pas besoin de le refaire. Mais si elle l’annule expressément, le contrat ne sera pas valable sans son assentiment. Si, toutefois, plus tard, elle donne son accord, elle devra, alors, renouveler le contrat.

Le savoir parfait appartient à Allâh سبحانه وتعالى, et notre dernière invocation est qu’Allâh, Seigneur des Mondes, soit Loué et que prière et salut soient sur notre Prophète, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection.

 

Alger, le 25 de Rabi‘ Ath-Thânî 1427 H,
correspondant au 1 mars 2008 G.

 



(1) Rapporté par : Aboû Dâwoûd (2096), Ibn Mâdjah (1875) et Ahmad (2469), par l’intermédiaire d’Ibn ‘Abbâs رضي الله عنهما. Ibn Hadjar a dit dans At-Talkhîs Al-Habîr (3/335) : « Les hommes de la chaîne de transmission de ce hadith sont dignes de confiance. » Ce hadith est jugé authentique par Ahmad Châkir dans sa Recension de Mousnad Ahmad (4/155) et par Al-Albânî dans Sahîh Abî Dâwoûd (2096).

(2) Rapporté par : Al-Boukhârî (5136) et Mouslim (1419), par l’intermédiaire d’Aboû Hourayra رضي الله عنه.

(3) Rapporté par : Mouslim (1421) et Al-Bayhaqî dans As-Sounane Al-Koubrâ (13441), par l’intermédiaire d’Ibn ‘Abbâs رضي الله عنهما.

(4) Cf. : Madjmoû‘ Al-Fatâwâ d’Ibn Taymiyya (32/25).